La musique ambiente n’est pas conçue pour soutenir une ambiance, mais pour la créer. Pourtant, n’est-ce pas le but de nombreux genres musicaux ? Écoutez Bitches Brew, les premiers albums de Weather Report, Meddle de Pink Floyd, entre autres – et quel nom pour un groupe, Weather Report, en parlant d’atmosphères musicales ! Beaucoup considèrent que tout a commencé en Allemagne, et non en Amérique, au début des années 70, avec des musiciens comme Klaus Schulze et Tangerine Dream. D’autres affirment que la musique ambiente trouve ses racines un peu plus tard, au-delà des ambiances cosmiques et spatiales de l’époque, avec Steve Roach et des influences comme David Parsons ou Kevin Braheny. Je crois que la recherche d’atmosphères étranges et d’ambiances inhabituelles est une tendance plus ancienne et plus répandue en musique, tout comme beaucoup recherchent l’évasion dans l’art.
Bref, je ne suis pas prof d’histoire :), juste un musicien qui voulait partager avec vous quelques-uns de ses goûts en matière de musique ambiente. Voici quelques-uns de mes albums préférés, avec de brèves notes.
Thom Brennan
Signals in Monlight (2003)
Thom Brennan est réputé pour ses entrelacements de nappes luxuriantes, créant des architectures sonores impressionnantes comme l’album « Secret Faith of Salamanders » (quel titre pour un album !). « Signals in Moonlight » évoque de nombreuses atmosphères, et l’utilisation surprenante de percussions électroniques vintage simples, lorsque l’auditeur n’attend plus de rythme, construit un paysage sonore riche de sens, conférant à cette utilisation épurée de sons rythmiques toute leur signification et leur puissance.
Strories from the Forest (2007)
Thom nous offre ici de magnifiques paysages sonores basée sur la guitare, dans un style qui rappelle indéniablement Robert Fripp. Même une guitare saturée peut créer des ambiances bien différentes de celles habituellement réservées au métal. Thom a également réalisé de superbes morceaux de guitare et de synthé sur son album « Beneath Clouds », composés de riffs répétés et limpides, évoluant et se transformant subtilement, et portant à eux seuls le rythme d’un album véritablement hypnotique et planant.
Dan Pound
J’ai découvert très récemment la musique de ce nouveau maître prolifique de l’ambient. Ses albums sont une brillante synthèse entre drone et ambient, un croisement entre les anciennes et les nouvelles écoles, et toujours une immersion dans des paysages imaginaires remplis de sons étranges et de bruits de fond suggérant des présences et des êtres d’ailleurs. Vraiment rafraîchissant, écoutez cette musique sans modération !
Beteween Interval – Autumn Continent
Between Interval est le nom du projet ambient de Stefan Strand, qui compte à ce jour quatre albums. Autumn Continent reste mon préféré en raison de sa progression et à la puissance de ses mélodies : tout y est question de simplicité et d’efficacité. L’ambiance automnale, avec ses paysages sonores brumeux et une sorte de mélancolie ambiante, enveloppe l’auditeur et crée une atmosphère profonde et envoûtante.
Sundial Aeon
Apothéosis (2007)
Ce groupe réussit une véritable fusion entre ambient et electro. Leurs morceaux très rythmiques et répétitifs révèlent des éléments mélodiques et rythmiques proches de la techno/electro, le tout dans une atmosphère chillout. Leurs albums, toujours basés sur un concept, expriment une profonde unité thématique, souvent autour d’imaginaires mythologiques rarement exploités dans les compositions modernes. Parfaits pour se ressourcer après une écoute de musiques trop pesantes !
Robert Rich et Alio Die
Fissures (1997)
Album d’une extrême douceur et d’une grande mélodie, purement ambient, où les percussions ethniques chères à Robert Rich sont utilisées avec parcimonie et une dimension quasi hiératique, comme dans le long morceau « Road to Wirikuta », terre sacrée des ancêtres divinisés des Indiens Huichols. Ce titre saisissant transporte l’auditeur dans une sorte de pèlerinage mystique à travers un paysage sonore ésotérique, sur les traces d’anciennes divinités…
Rudy Adrian
The Healing Lake (2000)
Purement ambient, quasiment sans percussions, à la frontière du New Age comme souvent pour les albums ambient. Des mélodies synthétiques fragiles et délicates, des nappes éthérées, de rares interventions de chimes et de percussions, et des textures et paysages sonores d’une pureté absolue plongent l’auditeur dans un univers onirique et apaisant, propice à la contemplation. Comme pour beaucoup d’albums ambient, ne cherchez pas une mélodie reconnaissable, une improvisation particulière : c’est l’atmosphere, la sensation ambiante, qui marquera les esprits et les mémoires. L’auditeur pourrait regretter la brièveté de l’album, mais on remarquera l’unité profonde d’une atmosphère véritablement originale.
Steve Roach
Que dire de l’œuvre de Steve Roach ? Totalement novatrice, elle pose les bases de la musique à venir, s’affranchissant complètement des structures musicales habituelles ; même la mélodie et le rythme sont parfois absents de ses projets les plus ambitieux. Que choisir dans une carrière aussi prolifique ?
Light Fantastic (1999)
Album lumineux 🙂 Superbes nappes sonores, sonorités enveloppantes et rythmes électro rapides mêlés à des percussions ethniques, progression remarquable tout au long des morceaux, devenant de plus en plus limpide jusqu’à « toucher la perle ». Le motif rythmique final, d’une présence et d’une force surprenantes malgré sa simplicité, plonge l’auditeur dans un paysage sonore étrange… Peut-être l’un des albums les plus accessibles d’une carrière si prolifique.
Fever Dreams III (2007)
« Fever Dreams » est un ensemble d’albums fascinants. Le troisième s’ouvre sur une mélodie étrange, jouée par une voix féminine de synthèse, qui se transforme progressivement au fil des morceaux, avant de plonger dans des drones et des cycles percussifs à la frontière entre musique électronique et musiques du monde. Cet album crée une atmosphère vraiment immersive, même à faible volume, pour « sublimer un instant », comme le dit Steve lui-même.
John Serrie
The Stargazer Journey (2000)
Cet album est rapidement devenu un classique parmi les classiques de la musique cosmique et ambiente, à la frontière des deux styles. Idées lumineuses, immersions profondes dans l’espace profond, voyages à travers des stations spatiales regorgeant de visions de futurs lointains, cet album conserve le meilleur de la musique « Berlin School » avec séquenceur et plonge dans des ambiances cosmiques d’une manière très moderne. Et n’oublions pas que le Stargazer était le vaisseau de Jean-Luc Picard, avant qu’il ne prenne le commandement de l’Enterprise !
Vidna Obmana
Crossing the trail (1997)
Cet album est le plus célèbre et le plus accessible de la discographie prolifique de cet artiste. Vidna Obmana y explore une manière d’utiliser les percussions dans un style surprenant. Si de nombreuses oeuvres dans ce style se limitent à des nappes de synthétiseur planant au-dessus de percussions ethniques, cet album est un véritable chef-d’œuvre de grooves apaisants et exotiques, une invitation au voyage.











